Méditation en forêt [LIBRE]

Depuis qu’Ellianne avait acheté le temple dans l’Empire d’Ahi’Kufu, Rayne s’était retrouvée à trainer souvent sur le continent de Punent-Isfel. Elle ne détestait pas la région à proprement parler, au contraire, elle aimait bien l’atmosphère générale qui y régnait. C’était simplement différent d’Archivant et la Blitzness Corp était également moins présente. Elle errait donc souvent dans les environs, ignorant dangers et autres menaces puisqu’elle était probablement plus dangereuse que beaucoup de créature qu’elle pouvait rencontrer lors de ses balades. Cette fois-ci, ses pas l’avaient portée jusqu’à cette forêt étrange et mystérieuse qui entourait Ahi’Kufu. Elle avait beau garder son épée à sa ceinture, elle avait promis à Ellianne de ne pas créer de problèmes. Elle était donc en pure exploration, attirée par cette puissante force occulte qui était la source de bien des légendes concernant la forêt en question. Si elle n’était pas très au courant de celles-ci, elle était curieuse de voir de ses propres yeux le lieu enchanté…

Puisque l’automne était entamé, on pouvait voir des feuilles d’or se balancer au-dessus de sa tête. On disait que celles-ci changeaient de couleur selon les saisons plutôt que de suivre le courant habituel de la nature. Rayne aimait ce phénomène et elle ne pouvait nier qu’elle trouvait simplement magnifique la lumière reflétée par ce feuillage doré en cette jolie fin de journée. Tout semblait briller de mille feux dans l’orange éclatant de l’heure tandis qu’elle absorbait cette vision divine avec une sérénité qui lui était rarement donnée. Pour une fois, elle semblait entièrement en paix avec elle-même, sa nature, l’environnement. C’était peut-être les résidus des effets calmants qu’avait le temple sur tous ceux qui y entraient. Elle y était si souvent que cet état d’esprit s’emparait peut-être lentement d’elle. Certes, elle détestait encore ces parties monstrueuses d’elle-même, mais elle ne pouvait rien y faire. Elle avait entendu parler de ces miraculeux sceaux qui pourraient la sauver, mais elle n’était pas folle, elle savait qu’un maître de cette rare magie n’était pas facile à trouver. Et puisque rien n’était gratuit, pas même les arts occultes, elle imaginait que le prix d’un tel sort serait élevé, sinon exorbitant.

Entourée d’une aura dorée, elle resta immobile au milieu de cette petite clairière où la lumière fusant de toutes les directions pouvait la toucher sans obstacle. Elle ferma les yeux et apprécia la douce chaleur qui se propageait sur sa peau, de son visage à ses mains et pieds. Elle ne pouvait changer, c’était un fait. Elle pouvait faire semblant autant qu’elle le voulait qu’elle n’était pas un monstre assoiffé de sang, mais lorsque la faim s’emparait d’elle, elle ne pouvait la combattre. Lorsqu’elle commençait à tuer, elle ne pouvait s’arrêter, s’abreuvant de la puissance qui la saisissait lorsqu’elle volait une vie. Elle était une Teremundo qui vivait sous une apparence illusoire d’humanité, mais même ses cheveux jadis noir jais étaient la preuve vivante du changement qui avait fait d’elle ce qu’elle était aujourd’hui. Il ne servait à rien de désirer une chose qu’elle ne pouvait atteindre et celle qu’elle considérait comme une sœur rendait tout tellement plus facile avec un simple sourire, avec sa seule présence à ses côtés.

Plongée dans ses pensées, dans une contemplation quasi méditative, la jeune femme n’était plus attentive à son environnement. En tant que guerrière chevronnée, elle savait bien que baisser sa garde n’était jamais une bonne idée. Cependant, dans un tel endroit, à cette heure, comment faire autrement? Si ce n’était que l’aura du dieu du calme qui faisait encore effet, elle avait tout de même un faible pour cette saison et pour les couleurs qui l’entouraient. Une odeur sucrée flottait dans l’air, un peu d’humidité. Il allait pleuvoir ce soir et elle s’en réjouissait, car elle aimait le son de l’eau qui tombait sur le sol, sur les feuilles, sur le toit. Elle aimait la fraîcheur qu’elle apportait, le pouvoir qu’elle lui donnait. Son élément était l’eau et la pluie était une source puissante pour elle. Et c’était joli à regarder à travers la lumière.

Rayne était toujours plongée dans sa méditation, la lumière l’entourant d’une aura dorée. Ses pensées vagabondaient librement dans sa tête, mais elle restait connectée au monde matériel. Elle ouvrit les yeux, ayant cru entendre un bruit. Elle resta immobile, toutefois, ne voulant pas provoquer la créature qui s’approchait. Elle ne serait pas étonnée de voir une bête sauvage comme il en existait dans les environs, voire même un Teremundo bestial. Cependant, un cliquetis de chaîne lui dit que ce n’était pas animal. Toujours dos à lui, elle feignit d’ignorer sa présence jusqu’à ce qu’il agisse. Elle ignorait ses intentions, et elle était prête à se défendre dans le cas où celles-ci seraient mauvaises.

Un homme était adossé à un arbre, sifflotant doucement. Elle se retourna vers lui lentement, prenant bien le temps de l’observer. Il avait des cheveux foncés et la lumière tombante les faisait briller d’un rouge violacé. Ses yeux étaient d’un drôle d’argent, bien qu’un soit recouvert d’un bandage, et son visage montrait des cicatrices. Il était vêtu de noir et il avait pour armes des chaînes qu’il tenait prêtes en cas d’attaque. Elle afficha ce demi-sourire qui lui était caractéristique, mis-dédaigneux, mi-amusé. Il savait peut-être se battre efficacement contre la majorité des bestioles qu’il pouvait trouver ici, mais contre elle, il n’avait aucune chance. Elle se demanda ce qu’il voulait, enfoncé aussi profondément dans la forêt mystique. L’avait-il traquée? Elle avait une jolie prime sur sa tête et il ne serait pas le premier à tenter de la prendre!

" Enfin sortie de vos songes, je pensais que je devrais vous embrasser tel le prince charmant réveillons la douce princesse... Mais laissons mes idioties de côté, je voudrai vous demander ce que vous faites ici, mais ça ne me regarde en rien. A vrai dire, puisque je tiens enfin quelqu'un j'aimerai savoir comment me rendre à Ahi'kufu."

Elle haussa un sourcil, ayant de la difficulté à suivre le cours des pensées de l’homme. Il était un idiot ou quoi? Elle en connaissait plusieurs qui l’auraient tué sur place. Quant à elle, elle continuait de le regarder avec une teinte de dédain. Il n’était qu’un simple humain, après tout… ou peut-être pas. Un détail attira son attention lorsqu’il retira son bandage. L’oeil de l’inconnu brillait d’un bleu étrange, et elle savait que ce n’était pas supposé être normal si rien de plus. Elle ignorait ce que ça signifiait, mais elle en avait quelques hypothèses.

" Oh... Moi c'est Glen, je suis... Un vagabond"

En temps normal, elle aurait sorti Calarenne et elle l’aurait tué. Ou elle se serait simplement détournée de lui, l’ignorant complètement. Cependant, elle était reposée et relativement de bonne humeur. Et puis, il l’intriguait bien qu’elle ne le montra pas. Elle resta sur ses gardes, cependant, ne désirant pas être fauchée par ces chaînes froides.

- Rayne, répondit-elle simplement en guise de présentation.

Suspicieuse, elle continua de le regarder avec attention. Il était rare qu’elle prenne la peine de donner son nom, surtout à des insectes comme lui. Elle ignorait ce qui l’avait poussé à le faire cette fois. Cependant, elle n’avait pas envie de lui dévoiler les motifs de sa présence dans cette forêt en ce moment, bien au contraire. S’il était le moindrement intelligent, il découvrirait qu’elle vivait non loin et elle n’avait pas envie que des chasseurs se lancent à sa poursuite. Elle avait besoin de se protéger, et de protéger Ellianne. Pour cette raison, elle restait prudente.

- Ahi’kufu est par là-bas, dit-elle en pointa la direction de l’empire. Puis-je vous demander dans quel but vous vous rendez là?

Elle n’hésitait pas à poser la question, même en n’ayant pas répondu à la sienne. Après tout, elle considérait qu’elle était en position de puissance face à lui et qu’elle n’avait rien à craindre de lui. Après tout, il était celui qui l’avait dérangée, et pour des conneries qui plus est! Saleté d’humains…

Pour être honnête, Rayne ne pensait pas que le jeune homme répondrait à sa question. Si c’était elle, elle n’aurait pas répondu… en fait, elle n’avait pas répondu. Ce qu’elle faisait n’était nullement de ses affaires et elle n’avait rien à faire de ce qu’il faisait ici. Tant qu’il ne causait pas de problèmes pour personne, surtout pour l’empire, elle s’en fichait complètement. En réalité, elle n’avait rien à faire qu’il cause des problèmes à l’empire, mais puisque sa présente résidence s’y trouvait, ce serait inconvénient qu’une guerre éclate dans cette région.

" Hé bien j'ai plusieurs raisons à ça... La première c'est que c'est l'endroit au monde où je suis le plus en sécurité, la seconde, c'est que je veux consulter les documents de l'antichambre, la troisième c'est qu'on me l'a conseillé. Tout simplement. Satisfaite ?"

La jeune Teremundo haussa des épaules. Elle était satisfaite dans la mesure où elle pouvait l’être. Cependant, ses motifs piquèrent sa curiosité. S’il allait dans l’antichambre, c’est qu’il recherchait des informations qu’on ne trouverait nulle part ailleurs. Et s’il désirait être en sécurité, c’est qu’il était pourchassé par quelqu’un ou quelque chose. Il devait avoir des contacts si on lui avait conseillé la place, et elle était bien curieuse d’en savoir davantage à son sujet… Elle le regarda s’approcher sans rien ajouter, se doutant qu’il était du genre bavard.

" Quoi qu'il en soit, je ne suis pas venu faire du grabuge, si c'est ce que tu penses, si tel était vraiment le cas, je ne chanterai pas comme un marsouin et je t'aurais attaqué sans même prendre le temps de te saluer."

Haussant sourcil, la Piats le regarda avec amusement. Il parlait comme s’il était convaincu qu’il aurait réussi à poser un seul doigt sur elle, l’insolent! Si elle n’avait pas été de bonne humeur, elle l’aurait tué à l’instant pour son arrogance. Elle se réserverait le plaisir pour une autre fois, ayant le sentiment que ce n’était qu’une première rencontre. Quelque chose de mouillé lui tomba dessus. Elle leva les yeux et sourit doucement tandis que les premières gouttes tombaient sur son visage, humidifiant sa peau pâle. Elle apprécia la fraîcheur nouvelle qui se répandait autour d’eux, tombant du ciel joyeusement. Cela ne fit que rajouter à sa bonne humeur. C’était une bonne journée.

" Oh... Voilà une surprise bien plaisante.... Cela faisait longtemps que je n'avais plus vu de pluie..."

Elle posa son regard à nouveau sur Glen, le vagabond. Il prit une position qui ne semblait pas tellement plus confortable, mais elle ne fit aucune remarque. Au moins, ils étaient d’accord sur un point : la pluie, c’était le bien. Elle en profita pour plonger son regard dans le sien et fouiller sa tête un peu. Elle avait envie de voir à qui elle avait affaire plus en détails et elle ne se retiendrait pas pour briser l’intimité de sa mémoire.

" Et donc...Rayne, ne serait-il pas temps que tu cesses de me regarder comme si j'étais une sorte de bourreau ? Je devrais largement avoir prouvé que je ne suis pas la pour faire des conneries, a moins que tu préfère une méthodes d'explication plus masculine ? Comme échanger des coups ahahah"

Il semblait dérangé par son regard. Elle revint à elle à ses paroles, la tête pleine de nouvelles images. La méthode proposée était bien tentante, mais elle avait d’autres plans après avoir exploré l’esprit de son interlocuteur. Ce n’avait été que des bribes, mais elle voyait bien qu’il était loin d’être l’humain typique. Ses parents… le peu qu’elle avait vu lui montra qu’ils étaient soit fous, soit simplement étranges. Ils étaient humains et ils protégeaient des Teremundos. Ils croyaient qu’ils étaient des êtres humains! Ridicules… ils étaient des monstres. Elle était un monstre et rien ne pouvait changer ce fait.

Affichant à présent une moue moqueuse, la jeune Piats laissa échapper un petit rire. Lorsqu’elle parla, ce ne fut qu’avec un ton empreint de sarcasme, de son dédain habituel pour les humain, mais plus prononcé.

- Glen Welkins… Je t’aime déjà! Tu es un spécimen rare d’idiotie de la race humaine, mais tu ne dois cela qu’à la philosophie étrange de tes parents! Enfin, je parie que tu veux te rendre à Ahi’kufu pour en apprendre davantage sur ton… petit problème?

Elle le toisa avec amusement. Ce n’était pas dans ses habitudes, loin de là! Parler de ses visions, c’était bien rare, surtout avec la personne concernée. Elle n’était même pas certaine de ce qu’elle voulait faire. Voulait-elle le provoquer? Ça l’agaçait que des humains meurent pour protéger un monstre, mais leur vie ne valait rien. Ce n’était pas le problème. Pourquoi diable pensaient-ils que le sacrifice était équivalent? De toute évidence, un Teremundo ne valait rien, pas tant qu’il était assez puissant pour se défendre seul. Si des humains devaient le protéger, il ne méritait pas mieux que la mort. Et sa conception que tous les humains détestaient les Teremundos, les fuyaient par peur… Cette exception était irréelle, improbable. C’était faux, des mensonges. Personne ne pouvait penser ainsi, personne! Ça ne faisait simplement pas de sens!

La pluie continuait de tomber, imbibant ses vêtements déjà ajustés qui se collaient à présent à elle, mettant en évidence ses courbes. Rayne ne s’inquiétait pas de gâcher sa jolie robe rouge et noire, ce n’était que de l’eau, son élément. Ses cheveux d’argents étaient également trempés et elle passa une main sur son front pour déplacer une mèche qui la gênait. Elle ne quittait pas le jeune homme des yeux, attentive au moindre changement en lui. Elle vit l’effet de son petit discours sur lui, mais il ne semblait pas aussi déstabilisé qu’elle l’aurait espéré, bien que pas tout à fait heureux de voir ses secrets dévoilés ainsi. Elle était curieuse de voir comment il réagirait. Confirmerait-il sa théorie que tous les humains étaient des salauds faibles qui ne comprenaient rien ou au contraire, resterait-il fidèle à sa conception des Teremundos?

" Un don.. Fort contraignant à ce qu'il semblerait, je ne puis rien te cacher. Soit, ma philosophie m'a bien était transmise par mes parents, mais la suivre est un choix qui m'appartient à moi seul. Et je me doute déjà de ce qui m'arrive, c'est la punition pour avoir tant utilisé mes don face à la B-corp, je veux simplement savoir quoi faire pour ne pas devenir une vulgaire goule"

Il était rapide, il avait compris les possibilités de son pouvoir. Il était vrai qu’elle le dévoilait rarement, préférant garder ses secrets pour elle-même. Tout avantage qu’elle pouvait conserver contre des ennemis était crucial, surtout dans une guerre de puissance comme celle qui régissait le monde des Teremundos. Elle ne pouvait laisser circuler librement des informations sur ses capacités, c’était non seulement imprudent, mais aussi irresponsable. Elle tiqua lorsqu’il mentionna la Blitzness Corp, détestant toujours autant l’organisation, mais enregistra bien qu’il agissait contre. Un allié, donc, dans la mesure où il pouvait l’être. Il devait les détester autant qu’elle, s’il s’était poussé au point de perdre contrôle. Elle comprenait parfaitement ses motifs, une goule étant une évolution primaire et dégradante de sa race. Personne ne voulait devenir une goule. Et pourtant, il avouait avoir choisi de penser comme ses parents même après leur mort. Il avait vu ce dont les Teremundos étaient capables et il continuait de croire qu’ils possédaient une humanité qu’ils n’avaient pas!

S’appuyant sur un arbre, le futur Teremundo continua son discours, toujours aussi neutre et froid. Elle ne pouvait pas le lui reprocher, elle avait envahi l’intimité de son esprit, après tout. Elle aurait été tout aussi mécontente si la situation avait été inversée. Seulement, elle était ce qu’elle était et pleinement consciente de sa supériorité. Oh, elle pouvait l’écraser quand elle le voulait, mais elle avait envie de jouer encore un peu. Et puis, elle avait un grand désir de comprendre ce qu’il était…

" Tu te donnes des airs supérieurs en me disant ça, pourtant tu associes les pêchés des un avec ceux qui n'en sont ni responsables, ni concernés. N'est-il pas de votre faute si votre anthropophagie vous à poussé à attirer le dédain des humains ? Vous devez vous nourrir, ils doivent protéger leurs vie, alors ils ont peurs et vous chassent alors que vous ne faites que manger. Les animaux devraient ressentir la même animosité envers les humains, car le rôle est inversé, pourtant, ça semble normal aux hommes de dévorer une bête. Je suis peut-être un... humain qui acquiert des instincts primaire, mais je ne vie pas dans la même réalité que ceux que tu hais. Cette opinion, ce ne sont pas mes parents qui me l'ont donné."

S’il n’avait pas souri, elle aurait cru qu’il cherchait la mort et elle aurait plus qu’heureuse de la lui accorder. Il était bien mal placé pour dire ce genre de choses, l’imbécile! Il ne savait rien d’elle et il n’avait aucun droit de lui parler ainsi! Il passa une main dans ses cheveux mouillés et s’approcha d’elle, n’ayant visiblement pas fini de parler. Elle le laissa faire, prête à lui sauter au cou à la prochaine insulte, mais ne se montra pas hostile puisqu’il semblait las plutôt qu’agressif.

" Si tu me hais tant, moi et ma race, pourquoi ne m'attaques-tu pas ? Si tu me transforme en teremundo avant que je trouve où et comment le faire moi-même, ton roi te récompensera non ? Où te demandes-tu si un humain tel que moi existe vraiment ? Pour ma part je tiens pas à combattre tu sais... J'ai déjà eut ma dose sur Archivant"

Comment pouvait-il continuer à sourire ainsi? Rayne devait avouer qu’elle ne le comprenait pas du tout, pas qu’elle l’admettrait s’il le lui demandait, tout de même! Elle avait sa fierté, nom d’un lapin, et s’abaisser à copiner avec un humain n’était pas son genre! Mais il n’était pas un humain normal et il ne le serait plus très longtemps, le pauvre.

- Je n’ai pas l’intention de te tuer, pas maintenant… tu es trop un spécimen intéressant, certes, et ce serait dommage de te gâcher en te réduisant à simple repas ou en un autre monstre inutile. Je ne tiens pas particulièrement à plaire à mon « Roi », tu sais, je ne partage pas sa… vision. Ni la tienne, d’ailleurs. Nous, les Teremundos, sommes des monstres sanguinaires. Nous sommes poussés certes par nos instincts et notre désir de nous nourrir, mais nous aimons tuer, nous aimons détruire. C’est par pur plaisir que nous sommes ainsi et que nous vous terrorisons. J’imagine que vous, faibles humains, avez une bonne raisons de nous chasser, mais je ne vous déteste pas, je vous méprise. Une race aussi faible n’a pas sa place dans ce monde et vous n’existez que pour nous nourrir et nous donner le plaisir de vous chasser.

Elle déballa tout cela plutôt calmement, l’ironie ne l’ayant pas entièrement quittée. Certes, elle pensait le moindre mot qu’elle avait prononcé, car c’était ainsi qu’elle voyait sa race. Même Elli aimait les massacres, bien qu’elle soit différente et qu’elle la considère comme sa sœur. Même elle, elle aimait le sentiment de puissance lorsqu’elle tuait un humain ou lorsqu’elle détruisait un bâtiment avec ses arts occultes. Elle voulait surtout se débarrasser de ce besoin de se nourrir de chair humaine, ça la dégoûtait tellement! Elle n’aimait pas être un monstre, mais elle ne pouvait ignorer ce que sa nature lui dictait de faire. Restant immobile devant Glen, la jeune Piats sourit doucement en secouant de la tête. À quoi bon de tenter de le convaincre de toute façon?

- Enfin, je suis heureuse que tu apprécies mes talents autant que moi. Quant à mes airs supérieurs, ils sont amplement justifiés. Rares sont ceux qui sont aptes à se mesurer à moi, sans vouloir me vanter, et certainement pas toi. Je ne sais pas si tu trouveras ce que tu cherches, mais je te le souhaite. J’ai moi-même…

Elle s’interrompit. Pourquoi avait-elle été sur le point de dire qu’elle avait sauté l’étape de goule? En quoi était-ce de ses affaires? Ce n’était pas comme si elle tentait de l’aider, après tout! Elle finirait par le tuer de toute façon, aujourd’hui ou lorsqu’ils se croiseraient à nouveau. Rayne recula de quelques pas et leva la tête vers le ciel. Elle ferma les yeux quelques instants, laissant la pluie tomber sur son visage, les gouttes coulant sur ses joues puis dans son cou. Elle les rouvrit et tourna la tête vers l’humain, fermée et à nouveau méfiante. Elle avait trop parlé, elle avait failli s’ouvrir. Voilà pourquoi elle évitait de dire plus que le nécessaire, avec n’importe qui sauf Elli.

- Tu devrais partir avant que je change d’avis, tu sais… Je suis un monstre et je commence à avoir faim. Ta propre arrogance, ou confiance en toi, m’irrite. Si je te revois, je te tuerai certainement.

Elle avait repris un ton dur et sa main s’était posée inconsciemment sur la garde de Calarenne, un réflexe difficile à se défaire. Cela faisait quelques bonnes années qu’elle comptait sur lui pour la défendre, même avec ses arts occultes. D’ailleurs, elle fit également un mince serpent d’eau qui s’enroula autour de son poignet deux fois, augmentant légèrement en taille avec la pluie qui tombait. Lorsqu’on était un guerrier, il valait mieux toujours être prêt.

La jeune Teremundo s’attendait à une attaque à tout moment, bien qu’elle douta que Glen soit réellement de taille à l’affronter. Il était humain, que pouvait-il réellement contre elle? Elle était Piats, et elle ne cessait de gagner en puissance, elle avait été sous la tutelle du présent Ras et elle était la proche amie et alliée de la Tri. Même s’il était assez puissant pour muter en Teremundo, simplement idiot pour abuser de ses pouvoirs, il ne pouvait pas lui arriver à la cheville et ce serait suicidaire de s’en prendre à elle! Elli ne laisserait jamais vivre quelqu’un qui lui aurait fait mal de toute façon, donc s’il la blessait gravement, il l’aurait à ses trousses bien rapidement.

"... Genkan...."

Il n’avait pas osé, si? Eh oui… Rayne grogna légèrement tandis qu’une lueur bleue venait confirmer ses doutes. Autour d’elle, l’air se refroidissait tandis que le sol se couvrait d’une fine couche de givre. Même les arbres arboraient à présent un manteau blanc léger. À son poignet, son serpent brillait comme s’il était composé de milliers de diamants. Sa frustration se mua lentement en étonnement et, même si elle ne l’avouerait jamais, en émerveillement. Le paysage était magnifique, la pluie s’étant figée autour d’eux. Il n’avait pas l’intention de la blesser, de toute évidence, mais il voulait lui montrer son potentiel. Elle l’avait sous-estimé, certes, mais elle n’en dit rien. Levant une main, elle créa une fine couche d’eau très haut au-dessus d’eux. Ainsi, là où la pluie tombait encore, les gouttes glissaient sur le mince dôme, ne venant pas gâcher la scène quasi-irréelle d’argent et d’éclats d’or du feuillage apparent.

Le jeune homme continuait de la regarder, poussant un soupir. Ils semblaient partager le même élément, songea-t-elle en se détendant doucement tandis qu’il prenait la parole.

" Arrêtes ça... Je sais qui tu es, Teremundos Piats les affiches ne mentent pas. Tout comme je savais qui était Ellianne en la croisant, je n'ai pas plus peur de toi que d'elle et je ne suis pas si faible. Si ma notoriété est si faible, c'est que trop peu on survécu pour témoigner."

Il soupira à nouveau tout en s’approchant, et elle reculant de quelques pas. Il ne semblait nullement handicapé par le givre, ce qui était naturel s’il maîtrisait l’élément. Il semblait cependant triste lorsqu’il la regarda et elle ne put s’empêcher de le sonder très en surface pour voir ce à quoi il pensait. Elle n’eut encore que des images brèves et des mots détachés, mais le tout prit sens lorsqu’il se mit à parler à nouveau avec un ton étrangement doux.

" Les humains sont faibles, pourtant ils vous résistent depuis si longtemps, pourquoi sont-ils toujours là s'ils ne méritent pas de fouler la terre ? Et surtout, n'étais-tu pas humaine à la base ? Tu te qualifies de monstre pourtant tu ne l'es pas plus que certains humains que je connais. Bon ou mal, tout n'est que relativité, si tu étais un monstre sanguinaire, tu aurais déjà sauté sur moi, pourtant tu as gardé des réflexes de guerrier de te mettre en garde avant de frapper, est-ce la ta façon de dire que tu es sanguinaire ? De plus, ne méditais-tu pas en train de méditer quand je suis arrivé ? Tu sous-estime ton coeur, jeune fille."

Il continuait d’avancer sans sembler s’inquiéter d’un coup venant d’elle. De toute façon, elle avait vu qu’il avait rencontré Elli, elle avait vu qu’ils étaient devenus amis. Elle ne lui ferait jamais de mal, elle ne voulait pas blesser sa sœur de cœur. Il n’avait plus rien à craindre d’elle, elle avait déjà relâché Calarenne. Elle n’avait pas pensé être si reconnaissable, ces foutues affiches étaient dérangeantes. Elle n’avait vraiment pas envie de se retrouver avec des chasseurs de prime sur les talons. Elle regarda Glen de façon suspicieuse, mais il ne pouvait vouloir la tuer, il l’aurait déjà fait. Enfin, essayé de le faire. D’ailleurs, le givre se retirait autour d’elle, se transformant en poussière étincelante. Son petit serpent était à nouveau fluide et son propre regard s’adoucit alors qu’il reprenait la parole. Encore. Mais ce qu’il était bavard, celui-là!

" Si les pulsions teremundos sont si contraignante, il suffit de trouver une solution de les révulser, sans se faire sceller ou sans manger pour ça, non ? Je compte bien trouver une autre voie que celles qu'on me proposes pour ma part."

Cette fois, il attira son intérêt en plus de son attention. Elle savait qu’il existait des moyens de « sceller » la partie monstre en soi, mais elle n’avait pas cru la chose possible. Ce pouvait être avantageux, mais elle restait un monstre, simplement enchaînée. Il voulait donc trouver un autre moyen de contrôler les instincts Teremundos et elle voulut lui dire qu’elle cherchait la même chose, mais quelque chose la retint. Pouvait-elle vraiment lui faire confiance? Il pouvait bien être un excellent menteur et comédien pour avoir berné Elli et elle, peut-être n’était-ce tout simplement qu’une ruse… Cependant, il resta là, toujours aussi peu agressif. Elle l’aurait vu dans sa tête, non? S’il avait voulu leur nuire, elle l’aurait certainement vu?

" Ah ah... Quelle semaine, la b-corp, le teremundo Tri, le teremundo Piats... Si demain je croise le Dva, j'hallucine.... Oh et je ne compte pas partir, j'aime notre conversation, alors belle Rayne, compte-tu me prouver une supériorité à laquelle je ne crois pas ? Ou bien .... ou bien... Ou bien ou pas. "

Rayne, contre toute attente, éclata de rire. Un rire sincère, dénudé de toute forme d’ironie ou de moquerie. Il était curieux, très curieux. Et il était ami avec Elli, de ce qu’elle avait pu voir, donc elle ne pouvait pas le blesser. Logique. Elle tendit son bras vers lui et transforma le serpent d’eau en glace, en faisant un joli bracelet. Elle ne pouvait le rendre liquide à nouveau, pas encore, et donc elle lui prouvait sa bonne foi. Mais peut-être ne l’interpréterait-il pas ainsi. Peu importait, elle clarifierait les choses. Puis, elle passa son autre main dans ses cheveux mi-mouillés, mi-givrés et elle le regarda avec un sourire.

- Glen, tu es plus informé que je ne l’aurais cru, mais je dois avouer que ces foutues affiches ne laissent pas place au doute. Je suis bien la Piats, chanceux que tu es! Mais ne pas me craindre, ne pas craindre Elli, je doute que ce soit prudent. Enfin, connaissant ma petite soeur, elle s’est montrée plutôt amicale avec toi, donc elle ne te ferait jamais de mal. Par conséquent, tu viens de quitter la zone rouge pour la zone neutre.

Elle s’impressionna, n’ayant pas l’habitude de parler beaucoup. Avec qui que ce soit, d’ailleurs. Elle n’avait pas de longues conversations philosophiques, gardant ses pensées pour elle-même. Elle les partageait parfois avec Elli, mais c’était bien la seule. D’un mouvement de main, elle cristallisa l’eau dans l’air pour en faire un rocher de glace sur lequel elle prit place avec nonchalance, jambes croisées. Elle tira Calarenne de son fourreau et le planta dans le sol à côté d’elle, question qu’il puisse aussi apprécier le joli paysage. Et puis, il serait à portée de main en cas de besoin… Elle hésitait à en dire davantage, mais elle haussa des épaules, songeant qu’elle n’avait rien à perdre.

- Tu ne me connais pas, alors tu ne peux me juger après si peu de temps… Je suis plus un monstre qu’humaine, ne l’oublie jamais. Et ne me compare pas à eux, nom d’un lapin! Mais je ne peux nier que j’étais autrefois une faible créature qui n’a pu protéger les personnes que j’aimais. Être Teremundo me donne une puissance dont je ne peux me départir. Que pour cela, je vis avec les conséquences de ma nature tant bien que mal. Mais si tu trouves une solution à ce petit problème, avant ou après ta perdition, je te serais reconnaissante de m’en faire part. Si je peux vivre sans manger d’humains, ce serait sympa. Ça goûte tellement mauvais!

Elle fit la grimace à la simple pensée, songeant d’ailleurs qu’elle n’avait pas mangé depuis longtemps… Regardant à nouveau Glen, la Piats sourit et ajouta, ayant retrouvé sa bonne humeur.

- Donc, amis?

Le temps filait, mais tout semblait figé, immobile. Il n’y avait qu’elle et lui, et l’éclat du givre parmi le feuillage d’or. Rayne sentait l’atmosphère pacifique avec une douce fraîcheur, comme si le nom d’Ellianne avait fondu l’un des murs de glaces qui la retenait. Elle n’avait plus à être sur ses gardes, pas totalement. Il y avait toujours la possibilité qu’une créature vienne interrompre cette rencontre qui s’avérait plus intéressante qu’elle ne l’avait d’abord cru, ou bien que le jeune homme dise ou fasse quelque chose de suspect. Toutefois, Glen ne dégageait pas cette impression, au contraire. Bien que conscient de sa témérité, il la traitait comme n’importe qui et non pas comme un être à fuir ou à abattre à tout prix. C’était… rafraîchissant. Elle avait bien fait d’intéressantes rencontres récemment, mais aucune ne comparait à celle-ci.

" Bien informé... Je suppose qu'avoir traversé le monde de long en large me permet en effet d'en savoir beaucoup, bien que le seul lieux qui puisse assouvir ma quête de connaissances soit le seul lieu auquel je ne puisse accéder. L'antichambre... Mais bon, on ne peut pas toute avoir, cette perte est compensée par des rencontre qui resterons gravé dans le marbre qu'est mon âme... je suppose."

Une âme de marbre… étrangement, cette tournure poétique faisait écho à sa propre âme, au moins tout aussi froide et dure que la sienne. Elle avait été une jeune fille très chaleureuse, pourtant. Devenir un monstre avait brisé quelque chose en elle, tout comme perdre ses sœurs, sa famille, avait créé un trou béant en elle. Si Ellianne n’était pas venue, elle serait mariée et peut-être porteuse d’une vie. Mais Rayne ne lui en voulait pas de l’avoir transformée, de l’avoir tirée d’une vie banale d’être humain. Au contraire, elle était heureuse d’avoir connu quelque chose de plus, et d’être à ses côtés presque quotidiennement. Mais quelque chose s’était brisé en elle et seule la présence de la jolie blondinette semblait mettre un baume sur cette blessure qui ne saignait pas. Elle s’y était faite, ne voyant pas l’intérêt de s’ouvrir à d’autres. Elli lui suffisait et elle n’avait jamais cherché à quitter cet état. En réalité, ça lui avait été favorable dans sa quête de puissance. Pas de pitié, pas de doutes, que du sang.

Le futur Teremundo la regarda avec un sourire, jouant avec une goutte d’eau. Au sol, il semblait bien confortable, mais il se releva avant d’ajouter à son discours. Elle le regardait avec douceur, trouvant étrange à quel point il semblait être un miroir d’elle-même. Ils avaient beau avoir de nombreuses différences, mais certains éléments frappants étaient suffisants pour qu’elle sente une certaine proximité avec lui.

" Je ne pense pas être capable de couper net à ma mutation, mais je me sais assez fort pour ne pas devenir une goule... Je continuerai de chercher un moyen de combattre la faim et un jour, je trouverai, ce jour la, tu seras la première au courant je peux te le promettre."


Elle sourit brièvement à cette promesse, doutant fortement qu’il la garde. Elle ignorait même s’il survivrait à la mutation pour rester un peu lui-même ou s’il deviendrait un monstre sanguinaire. Si c’était le deuxième cas, il ne se souviendrait plus de cette soirée, s’il se souvenait seulement de sa quête! Curieuse, elle ne le lâcha pas de ses yeux émeraude tandis qu’il ouvrit sa veste. Dans sa main, il tenait un pendentif qui brillait doucement, lueur parfaitement appropriée dans le décor qui les entourait. Il s’approcha d’elle et s’abaissa au niveau du sol, le lui tendant. Il était très proche d’elle, un peu trop pour qu’elle soit parfaitement à l’aise. Cependant, il souriait, comme pour la rassurer de ses bonnes intentions.

" Ce pendentif est très important pour moi, c'est le symbole de ma lutte.. Je te le laisse, en signe d'amitié et surtout pour sceller ma promesse. Je reviendrai le chercher un jour, le jour où j'aurais enfin trouvé les réponses que je cherche, alors, garde le et protéger le pour moi, ma nouvelle amie, Rayne"

Son sourire s’agrandit et la jeune Teremundo y répondit avec un petit, quasi-timide. Il ne le vit pas, toutefois, ayant les yeux fermés. Elle tendit la main pour prendre ce cadeau inestimable pour Glen, serrant entre ses doigts le cristal bleuté. Aussitôt, elle attacha la corde autour de son poignet, juste au-dessus du serpent de glace qu’elle avait créé. Elle ne comprenait pas cette confiance, mais étrangement, le fait qu’il lui confie un objet d’une telle valeur créait une douce chaleur en elle. Elle y ferait bien attention, qu’ils se revoient ou non.

" Oh, je te laisse pas le choix de refuser tu sais ahah" ajouta-t-il en se relevant.

Il rit et elle sourit, n’ayant pas pensé à refuser cette offre, cette promesse. N’eut-ce été que par simple courtoisie, elle aurait accepté, mais elle l’avait fait parce qu’elle le voulait bien. Il avait su être convainquant avec ses mots, mais c’était davantage la sincérité de son amitié qui l’avait adoucie. Après tout, n’importe quel beau parleur aurait pu tisser le même discours, mais il n’aurait jamais pu l’atteindre comme Glen l’avait fait avec l’authenticité de ses sentiments.

" ... Une déesse.... Hum, oh, je pensais à voix haute, ne prends pas attention à mes songes, bien que tu l'ai déjà fait plus tôt en fait..."

Il éclata de rire agréablement tandis que la jeune Piats haussa un sourcil. Elle n’avait pas suivi le cours de ses pensées, aussi ne comprenait-elle pas la référence. Elle eut bien envie d’infiltrer son esprit encore une fois, mais elle se retint. Ce n’était pas très poli et elle avait déjà abusé. De plus, s’ils étaient pour être amis, ce serait préférable qu’elle lui laisse un peu d’intimité. Aussi se contenta-t-elle de répondre avec une teinte d’amusement sans moquerie.

- Tu n’as pas à t’inquiéter, ta tête est tienne à présent. Je ne me pencherai plus sur tes songes, bien que je sois plutôt curieuse. Tu es certainement l’un des humain les plus étranges que j’aie jamais rencontrés, mais c’est un compliment, ne te méprend pas!

Elle rigola, songeant qu’il sortait réellement du lot. Il était probablement l’exception qui confirmait la règle que tout humain était idiot et indigne de son intérêt. Jouant avec le cristal de sa main, elle baissa la tête pour regarder à nouveau le pendentif qui lui avait été confié tellement de façon inattendue. Elle resta quelques instants, se demandant quelle était l’histoire de l’objet, de quels événements avait-il été témoin. Peut-être que Glen consentirait à lui raconter sa vie, de façon moins décousue que ce qu’elle avait pu entrevoir. Peut-être qu’elle partagerait un peu de sa propre expérience avec lui, puisqu’il lui semblait injuste qu’elle en sache autant.

- Merci, dit-elle après un moment, relevant vers lui un regard sincère. Cette preuve d’amitié... J’espère vraiment que tu trouveras, je continuerai à chercher de mon côté. Si on peut se sauver l’un l’autre, ce ne serait pas mal, non?

Elle sourit, se disant qu’il pourrait probablement l’aider à plus d’un niveau, pas que pour la faim. Elle en avait probablement déjà dit beaucoup avec ces quelques mots, s’il arrivait à voir leur pleine signification. Elle n’était pas douée pour parler de certaines choses et c’était pourquoi elle aimait utiliser ses dons, ça lui permettait de transmettre plus que des mots. Ces derniers pouvaient être trompeurs, mais les sentiments, les émotions, c’était vrai, ce ne pouvait être feint.

- Alors, des rencontres intéressantes, que tu dis… mis à part Elli, y’en a eu d’autres? Demanda-t-elle, changeant par la même occasion de sujet.

Le dôme se dissipa lentement tandis que les gouttes se faisaient plus rares et plus espacées. Le ciel s’éclaircissait lentement pour faire apparaître un ciel étoilé entre quelques nuages gris qui s’attardaient. Il serait bientôt temps pour la Piats de rentrer au temple, mais étrangement, elle avait envie de prolonger un peu le temps qu’elle avait avec le jeune vagabond…

" Et bien... J'ai rencontré cette capitaine qui est un peu comme une sœur pour moi, enfin je suis plutôt un frère pour elle plus qu'elle n'est un sœur pour moi ahahaha. Dommage, le contexte et le destin ont fait que nous sommes ennemis. Sinon, j'ai aussi rencontré un caravane marchande qui était d'une bonté incroyable, sans eux je serais mort dans le désert... Ensuite il a y Elli.. Et pour finir, toi, Rayne"

Souriant, elle l’écoutait parler avec un certain amusement. Il avait le rire facile, ça lui rappelait Elli. Elle aimait bien les gens de bonne humeur, ça l’aidait à sortir un peu de sa bulle. Il lui parlait ouvertement, comme s’ils étaient proches. Certes, ils étaient amis, à présent, mais est-ce que simplement le décider était suffisant? Elle sourit et songea qu’au contraire, pas besoin de le dire, il fallait simplement agir comme tel. Pour lui, tout semblait facile. Créer des liens semblait simple. Lorsqu’il avait dit capitaine, elle songea immédiatement à la B-Corp et trouva étrange qu’il ait de proches connaissances dans l’organisation, mais Elli aussi y avait plein de copains. Elle était un peu habituée à ce paradoxe. Mais tous deux semblaient pouvoir voir outre les différences de philosophie et de pensée, outre la race et leur appartenance. Tous deux ne voyaient que ce qu’une personne était dans son essence. Elle remarqua alors que son regard était plongé dans le sien, la regarda avec insistance. Ça la mit un peu mal à l’aise, ce qui entraîna un léger rougissement de sa part.

" Nous aider mutuellement hein... L'idée est plaisante, très plaisante même. Je suis certain qu'à nous deux nous trouverons la solution, après tout, le destin ne nous surement pas réunis au hasard, du moins c'est ce que je pense ahah"

Destin? Rayne ne croyait pas à une telle chose. Elle ne croyait pas en beaucoup de choses, mis à part ce qu’elle pouvait voir, toucher et tuer. Le matériel, le réel, voilà ce qui était certain. Les croyances étaient toutes différentes et elles ne reposaient sur rien de concret… mais elle ne jugeait pas Glen. S’il voulait croire en le destin, il le pouvait. C’en était presque mignon! Elle, elle voyait leur rencontre comme une simple coïncidence, rien de plus. Elle avait gagné un allié, mais il aurait pu être un ennemi tout aussi facilement. Ou alors, elle aurait pu être de mauvaise humeur et le tuer avant même de tenter une conversation. Ce n’était que les circonstances qui avaient fait en sorte que leur rencontre s’était passée ainsi.

" Je me demande ce que demain nous réserve... Bah... Ça sert à rien de trop se prendre la tête. Après tout aujourd'hui c'était demain hier si on part sur ce principe, aujourd'hui est déjà une surprise. La preuve j'ai rencontré une personne merveilleuse ahahah"

La jeune Teremundo haussa un sourcil, amusée. Elle, une merveilleuse personne? Question de point de vue, probablement! Il pouvait bien la considérer comme tel si ça lui chantait, cependant, il semblait soudain nerveux. Il avait cessé de rire et il tenta de se reprendre.

" Oh ne pense pas que je te drague ! Euh... c'est pas que tu ne vaut pas la peine, enfin si tu en vaut la peine, complétement ! Ah mais ça veut pas dire que je veux te draguer, Enfin si ! Enfin non... Mais je ... tu.... , mais... Euh... ... ..."

Elle rigola doucement de sa maladresse, sans méchanceté. C’était en fait assez mignon, étant donné qu’elle n’avait jamais vraiment connu ça de son vivant. Elle avait été trop jeune, puis son père avait décidé de son futur mari sans son consentement. Ça ne l’avait pas dérangé outre mesure, elle avait été élevée dans ce but. Elle devait épouser un homme de bonne famille afin de sceller et solidifier une alliance. Ça la frappa soudainement que ce n’était plus le cas. Son père était mort, son village détruit et il n’y avait personne pour décider de son avenir. Elle n’avait jamais songé à se marier ou même à avoir une relation amoureuse avec qui que ce soit, mais en ce moment, elle songea qu’elle était libre de prendre ses propres décisions à ce sujet et elle en fut très confuse.

De toute évidence, Glen n’était pas plus à l’aise puisqu’il bafouillait et radotait. Il se racla la gorge avant de rajouter plus calmement :

" En version calme ça donne... Je disais pas ça pour draguer, je suppose, ce serait malvenu ahah"

Elle ne perdit pas son sourire pour autant, plutôt amusée par la situation qu’offensée. Elle n’était pas certaine de la réaction qu’elle devrait avoir, de ce qui serait approprié aux circonstances. Elle hésita quelques instants, passant diverses possibilités dans sa tête. Elle avait lu quelques romans à l’eau de rose, et quelques manuels de combat, mais tout semblait si loin dans sa tête et elle semblait se souvenir que des différentes techniques de combat. La drague était loin d’être son domaine!

- Je euh… commença-t-elle avant de s’interrompre.

Elle sourit, légèrement embarrassée et finit par hausser des épaules. Si elle continuait de parler, elle finirait par bafouiller comme lui, et ce serait un désastre! Elle n’avait nullement besoin de s’enfoncer inutilement!

- Ça va, t’inquiètes! C’est pas comme si je pensais que tu étais réellement intéressé, on vient à peine de se rencontrer.

Elle sourit avec douceur, ne voulant pas qu’il interprète mal ses mots qui pouvaient peut-être sembler rudes. Elle avait opté pour une approche assez désinvolte, bien qu’elle ne fût pas certaine que ce soit l’impression donnée. Après tout, il avait bien finit par dire qu’il ne tentait pas de la draguer, bien que ça ait pu sembler être le cas! Ils se connaissaient à peine et ils étaient devenus amis. Puisqu’elle savait comment être une amie et non pas comment draguer, ce serait plus simple pour elle. Elle n’avait pas envie qu’un froid s’installe entre eux et vienne gâcher cette nouvelle relation qu’elle appréciait déjà.

- Il commence à se faire tard… tu prévois camper pour la nuit? La forêt n’est pas l’endroit le plus sûr et Ahi’kufu est encore un peu loin, mais à vol d’oiseau, ça le fait bien.

Encore une fois elle avait changé le sujet rapidement et avec efficacité. Elle se leva et tira Calarenne du sol, le remettant à sa place, à sa ceinture d’or et d’émeraude. Elle fit face au jeune homme, songeant qu’elle devrait peut-être l’inviter au Temple. Après tout, il y avait de nombreuses chambres inoccupées et ça le rapprocherait de l’antichambre, pour ses recherches. Quant à elle, elle ne pouvait pas voir où elle irait passer la nuit si ce n’était pas chez elle.

- Je… tu pourrais passer la nuit chez Elli et moi, nous avons plusieurs chambres inoccupées. Enfin, si tu veux bien et que tu n’as pas d’autres plans.

Elle ne le connaissait pas suffisamment pour savoir s’il avait des contacts. Peut-être qu’il avait des amis qui l’attendaient et qui l’hébergeraient. Et peut-être qu’il n’avait pas tellement envie de passer plus de temps en sa compagnie malgré ses sourires et ses paroles amicales. Elle le saurait assez tôt!

La jeune Piats espérait vraiment que Glen accepte de l’accompagner. Elle n’aimait pas l’idée de l’abandonner dans la forêt, bien qu’elle jugeait qu’il était largement capable de se défendre seul. Elle préférait le savoir en sécurité au temple, résidu de son instinct maternel fort, probablement. Elle en avait même oublié le malaise, préférant se pencher sur le futur que sur le passé.

"Hm, j'accepte, en fait, je comptais dormir dans les arbres à la base, mais si je peux avoir une chambre dans l'empire qui plus est, je ne dis pas non ahah"

Rayne avait pensé voler jusqu’au temple, ça lui aurait évité une longue marche, mais puisqu’il avait accepté son invitation, elle était plus qu’heureuse de s’y rendre à pied. Il n’avait pas d’ailes, donc ça aurait été inconvenant et elle n’était pas assez forte pour le porter, mais ça leur donnait un peu plus de temps pour parler et apprendre à se connaître. Ils arriveraient un peu plus tard, mais ce n’était pas un problème, vraiment. Elle prit donc les devants puisqu’elle connaissait visiblement mieux la forêt que lui. Après un moment, toutefois, il vint marcher à ses côtés. Elle se tourna vers lui et sourit tandis qu’il prenait la parole à nouveau.

" Ahi-Kufu, une ville si difficile d’accès, comme diable toi et Elli pouvez-vous y habiter ? C'est peut-être personnel ceci dit, en tout cas je suis ravis d'y passer une nuit, dans un temple qui plus est. Et avec des amies, je pourrais pas rêver mieux, si seulement ces moments pouvaient être éternel comme le givre."

Elle le regardait avec toujours la même curiosité. Il avait un côté poétique, semblait-il. Elle pouvait cependant voir l’émotion sincère qui transparaissait sur son visage tandis qu’il parlait. Elle commençait à bien l’aimer, celui-là. Un étrange humain, il n’y avait pas à dire, mais il était sympathique et sincère, ce qui était plutôt rare à trouver parmi cette race faible et corrompue. Il semblait d’ailleurs perdu dans ses pensées et elle retint encore une fois l’envie de le lire, puisqu’ils étaient à présent amis. L’envie lui passa, de toute manière, lorsqu’elle le vit recevoir une branche dans le nez tant il était absorbé. Elle éclata alors de rire, simplement amusée par la scène. Elle allait faire une remarque, mais elle fut interrompue par sa demande.

" Ne... Dis rien... On a rien vu ahahahah. Dis moi plutôt Rayne, tu n'avais pas répondu à ma question que faisais-tu dans les bois seule aussi tardivement, simplement de la méditation ?"

La jeune Termundo rigola doucement, acceptant de faire comme si rien n’était arrivé, pour préserver l’égo de son nouvel ami. Elle se dit d’ailleurs que, pour cette raison, elle pouvait bien partager avec lui les raisons de sa venue dans la forêt. Ce n’était pas comme c’était un secret, de toute façon!

" Elli... Je me demande comme elle va réagir en nous voyant tout les deux, surement gaiement et bruyamment, mais c'est ce qui la rend si unique et marrante."

Il continuait de sourire et elle fit pareil. Elle savait qu’ils se connaissaient déjà, elle ne pouvait pas imaginer que la nouvelle Tri serait mécontente de le revoir. En fait, elle serait certainement heureuse de voir qu’ils s’entendaient bien et elle l’accueillerait sous son toit avec plaisir. Et inversement, elle était heureuse de savoir qu’Ellianne et Glen étaient également amis, elle ne voudrait pas la mettre dans une situation embarrassante.

- Elli… elle sera enchantée que je me sois fait un nouvel ami. C’est d’ailleurs grâce à elle si nous avons obtenu le Temple. Elle a des contacts, mais aussi les fonds! Il suffit juste d’être sage dans l’Empire et on n’aura pas de problème!

Par sage, elle entendait pas de meurtres, pas de chasse, pas perturbations en lieu publique. Rien. Elle devait agir comme une bonne petite fille en société, mais ce n’était pas comme si c’était vraiment un problème. Rayne ne créait pas de problèmes pour le simple plaisir de profiter du chaos. Elle préférait le calme lorsque c’était possible et un peu de repos une fois de temps en temps ne faisait pas de tort.

- Quant à ce que je faisais dans la forêt, en effet, je ne faisais que me promener. J’aime bien ce lieu un peu magique. C’est calme et je sais que je risque peu, alors j’en profite pour méditer. Jusqu’à ce qu’un vagabond étrange vienne me déranger!

Elle lui fit un clin d’œil amusé, ne lui en voulant pas du tout du dérangement. Il était vrai qu’elle aimait la forêt mystique et le calme, le silence, mais leur rencontre avait été plaisante en fin de compte. Dire qu’elle le ramenait chez elle… C’était franchement inattendu!

- Enfin, j’ose espérer que tu seras plus confortable dans une de nos chambres d’invités que dans un arbre! Ce sera plus calme, aussi, le temple étant dédié à au dieu AŦild.

Elle sourit tout en continuant de marcher, approchant enfin la lisière de la forêt. Ensuite, c’était direction du temple, ils n’en avaient plus tellement pour longtemps! Elle songea qu’elle devrait probablement lui offrir quelque chose à manger et à boire, et peut-être de l’eau chaude pour un bain. Il voyageait beaucoup, il devait être épuisé. Elle tenta de se rappeler de toutes les politesses dont elle faisait preuve dans le passé, quand elle était humaine. Sa mère étant morte, c’était elle qui s’occupait des invités de son père lorsqu’ils séjournaient au manoir. Elle n’avait plus l’habitude, mais ça lui revenait rapidement.

HJ : Désolée, c'pas de l'art! Je te laisse boucler ici et j’ouvrirai au temple, si ça te va ^^