Mission dans les marécages [SOLO]

Les miasmes d'une ancienne attaque de Teremundos sur la région. Voilà ce qu'elle était chargée d'éliminer. C'était... hé bien... plutôt vague, en fait. Mais voilà, elle devrait tout simplement s'en contenter, pas le choix. Le rapport ne disait malheureusement rien de plus au sujet de ces « miasmes », peut-être tout simplement parce qu'il n'y avait rien de plus à dire, du côté des services de la Blitzness Corporation. Parfois, on envoyait des gens intervenir sur base d'informations plus que fragmentaires, pour tout un tas de raisons. En l'occurrence, parce que ces fameux « miasmes » qu'on avait signalés pouvaient potentiellement se révéler dangereux pour certains territoires sous le contrôle direct de la puissante entreprise-état, comme par exemple la cité de LéaFirma, reconquise de haute lutte sur les Teremundos qui l'avaient occupés pendant quelques temps, une occupation qu'ils avaient pu prolonger quelque peu sans trop être dérangés à cause de la Guerre de Las Fantas et de ses conséquences, qui avaient longtemps mobilisées puis immobilisées loin de là les forces de l'organisation la plus crainte des montres – et non sans raison, après tout ils l'avaient perdue, cette guerre – compliquant quelque peu le reconquête.

Mais voilà, LéaFirma avait maintenant été libérée du joug des monstres sanguinaires, et même placé sous la juridiction directe de la Blitzness Corporation. Cela, Alwine était très bien placée pour le savoir, puisqu'elle avait participé plus qu'activement à ladite reconquête. On pouvait même dire, de façon totalement objective et sans aucun risque d'exagération, qu'elle avait fait la moitié du travail global de destruction des Teremundos. Ce n'était d'ailleurs pas bien difficile à déterminer, puisque le travail c'était tout simplement fait à deux, elle et Lucia-Sama, alias Aikawa Lucia, sa supérieure directe et Capitaine de la Première Section. Hé oui, seulement deux femmes pour reconquérir toute une ville, mais bon, c'était deux des plus puissants éléments de la terrible entreprise-état, surtout si on ne comptait que les forces dites « régulière » de ladite entreprise – c'est-à-dire sans compter les Bras Droits et l'inégalable Section Zéro, sans parler même du Président-Directeur-Général, Dial Blitzness, qui était au-delà de tous les classement – ce qui n'était pas rien. Et puis, d'un autre côté, il n'y avait eut que deux femmes pour conquérir la ville, côté Teremundos, et il semblait même que cela s'était en fait opéré par pur accident suite à une journée de shopping qui avait mal tournée.

Seulement voilà, tout ça c'était très bien, mais maintenant que LéaFirma était reconquise, il fallait aussi en assurer la sécurité, ce qui passait par la sécurisation plus ou moins complète des territoires proches ou voisins qui n'étaient pas sous contrôle direct de la Blitzness Corporation. Le tout en portant, comme de bien entendu, une attention particulière aux zones dites « à risque », d'où les problèmes avaient le plus de chance de survenir. Le seul petit soucis dans cette théorie, c'était que tous les lieux de Gaëa étaient « à risque », en fait, quand on y réfléchissait deux minutes, et que c'était encore deux à trois fois plus vrai, en moyenne, quand on était à Punent-Isfel, comme c'était le cas ici. Autant dire que la puissante entreprise-état devait mobiliser de beaux moyens pour sécurisé tous ces endroits, et n'avait pas forcément l'occasion de faire une enquête poussée sur tout ce qui lui était signalé par les citoyens, loin de là. Il était parfois plus simple d'envoyer une personne « voir et régler le problème » que d'en envoyer deux, une pour voir l'état des choses et l'autre, éventuellement, pour régler ce qui n'allait pas. Autant envoyer quelqu'un pour le tout, quitte à ce que la deuxième partie de ce tout soit inexistant, à vrai dire.

Une fois arrivé, là, il était plus que compréhensible d'apprendre qu'on s'arrangeait souvent, ou en tous cas autant que faire se pouvait, pour refiler ce genre de trucs à des membres de haut vol en attente d'une mission. Comme ça on faisait d'une pierre deux coups ! D'un côté, on occupait ces hauts potentiels à faire quelque chose, au lieu de les laisser inexploités, et de l'autre hé bien on réglait un problème qui sinon aurait nécessité la mobilisation de forces nombreuses, soit en envoyant des espions en avant-garde, soit en prévoyant un très fort parti de soldats, soit en faisant carrément appel à des machines de guerre. Toutes ces options étant plus coûteuses et difficiles à mettre en place les unes que les autres, le fait de pouvoir les éviter était bien entendu plus que bienvenue. Sans compter qu'en plus cela pouvait potentiellement faire de l'entraînement aux soldats les plus performants de la Blitzness Corporation, qui en contrepartie touchaient souvent une prime – et bien entendu ce détail leur faisait toujours plaisir. Et puis, si la personne était suffisamment forte on pouvait l'envoyer sans trop de soucis dans le noir le plus complet avec la certitude relativement absolue et certaine qu'elle allait s'en tirer, alors que pour un groupe de troufions on ne savait jamais si une partie n'allait pas mourir au combat, entraînant ainsi des frais d'enterrement, de faire-part, d’indemnités aux familles et finalement de remplacement et de formation des remplaçants.

Oui, bon, d'accord, ça faisait un peu plus que deux coups avec cette seule pierre, mais cela prouvait bien combien l'opération était avantageuse, et cela pour tout le monde. Et cela expliquait aussi pourquoi l'ordre de mission d'Alwine portait pour toute instruction la consigne de s'occuper de ces fameux « miasmes » laissés dans les Marécages Fleuris, histoire que lesdits miasmes ne finissent pas par déborder sur LéaFirma. Vu le mal qu'elle s'était donnée pour reconquérir cette citée et y ramener la paix, ainsi que la prospérité et la vie humaine en général – ce qui était quand même bien plus louable que de la laisser aux mains, ou plutôt aux pattes, de monstres assoiffés de sang et affamés de chaire humaine qui ne songeaient qu'à dévorer et à détruire, quoi que puisse bien en penser un certain samouraï de notre connaissance, qui aurait eut beau jeu de regarder un spectacle de danse en pleine ville livré aux Teremundos, tient ! – elle ne tenait pas à voir l'endroit gangrené par les monstres pour bientôt retomber entre leurs griffes, dont il faudrait à nouveau l'extraire par la manière forte, à savoir à grands coups de pieds dans les fesses des Vilaines Pas Gentilles qui n'auraient pas manqué de se développer là le temps que les re-Conquistadors de la nouvelle vague arrive sur les lieux pour rendre la ville à son état normal.

Et voilà donc pourquoi, et comment, elle s'était retrouvée à devoir gagner le Marécage Fleurit pour éviter que pareille chose ne se produise. On avait pu lui fournir une vague carte indiquant plus ou moins l'endroit probable où se trouvaient les « miasmes » posant problème, et c'était tout, pour le reste elle devait tout simplement se débrouiller, sans plus. Mais bon, ce n'était pas comme si elle n'avait pas l'habitude, ou qu'un peu d’exploration puisse lui faire peur, fut-ce en terrain marécageux. Après tout, elle était quand même Alwine Azamalon, Lieutenante de la Première Section, celle des Élites, vétérante de nombreuses guerres et batailles, y compris celles de Las Fantas ou de LéaFirma, même si ce n'étaient là que de simples exemples au rang de tout ce qu'elle avait accomplis. Et bientôt elle aurait un nouveau fait d'arme à rajouter à la fin très provisoire de cette interminable liste de hauts faits. Enfin, ils étaient plus ou moins hauts selon les époques et surtout les occasions, mais ils étaient tous et de façon indiscutable les témoins de sa bravoure et de sa ténacité, des qualités qu'elle comptait bien appliquer une nouvelle fois à l’exercice de son devoir, pour réussir une nouvelle fois à abattre tous les obstacles qui se présenteraient à elle !

Ces obstacles, quand ils étaient purement matériels et naturels, tout particulièrement, trouvaient en général une solution aussi simple qu'évidente... une fois qu'on l'avait énoncée, bien sûr, car avant cela encore fallait-il y penser ! En l'occurrence, il était question du sol du marais, qui aurait pu poser problème à bien des gens, en vérité. Mais pas à elle, non pas ! Pour elle, ce n'était pas plus embêtant que si cela avait été un sol bien dur et ferme sous ses pieds, autant dire donc que ce n'était pas embêtant du tout ! Et cela tout simplement parce qu'elle avait un petit tour bien de chez elle pour éviter ce genre de problème plutôt énervant, et qui pouvait même se révéler très propice à vous retarder si pas vous handicapée, allant même parfois jusqu'au risque de mort pure et simple. Autant de choses qui paraissaient beaucoup moins concrètes... quand on gelait le sol sous ses pieds tout en avançant, grâce à un dérivé de sa technique de givre, le même dérivé utilisé pour créer sa technique de la patinoire. Elle n'allait pas jusqu'ici, en l'occurrence, mais tout de même bien assez loin pour que ses pieds ne trouvent pas à s'enfoncer dans le marécage, ce qui était au fond tout ce qui comptait, lui permettant une avance rapide et dénuée de soucis superflus.

Ce n'était pas la première fois qu'Alwine opérait dans les Marécages Fleuris, bien entendu, ce qui expliquait au passage son extrême facilité à se mouvoir en son sein. Elle était déjà venue plusieurs fois par le passé, et notamment pour une mission en compagnie d'un Capitaine et ancien élève, le Capitaine Jill, de la Section de Cavalerie – le joli nom pour le Section des Blindés Légers et Aéronefs, même si elle n'avait jamais très bien compris à quoi ça rimait au juste d'appeler cette dernière ainsi. Une mission qui avait été écourtée, en dépit de son succès... et qui avait été suivie, peu de temps après, par le décès de l'officier supérieur dans un combat contre une des ex-membres du Classement des Huit Grands Teremundos, un adversaire non-négligeable qui avait réussi à l'emporter avant d'être obligée de fuir devant les forces de la Blitzness Corporation sur place, qui entre temps avaient été partiellement renouvelées. C'étaient là de vieux souvenir, mais cela n'empêcha pas une pointe de nostalgie bien compréhensible de vriller le cœur de la belle Dame de Glace, qui s'arrêta quelques instants en mémoire de son ancien élève, compagnon et frère d'arme, tombé au combat comme tant d'autres avant lui et après lui. Telle était la dure loi des Sections de Combat au sein de la toute-puissante entreprise-état, malheureusement !

D'autres étaient tombés et tomberaient, oui, dont certains avaient été, étaient ou seraient de ses amis, c'était incontestable, mais elle n'allait pas se laisser bercer par la mélancolie pour autant, ça non ! Après tout elle était encore vivante, elle, et elle comptait bien le rester, pour prendre un jour sa retraite après des années de service plus que nombreuses, en profitant d'une pension largement méritée et surtout plus que dorée, tient ! Et entre-temps, hé bien... elle aurait simplement à ne pas mourir, en espérant que d'autres tiennent se défis avec elle. Il y en avait pour qui cette réussite ne faisait pas le moindre petit doute, comme Lucia-Sama, par exemple ! Ah oui, elle elle était sûre qu'elle serait toujours là, qu'elle se relèverait toujours et continuerait la route, avec elle. Et elle la suivrait jusqu'au bout du monde, jusqu'au bout de l'enfer, même, sa sublime Capitaine, quoi qu'il lui en coûte ! Que ce soit en tant que Capitaine, justement, ou à un autre poste de la Blitzness Corporation – dans la Section Zéro, par exemple, sur laquelle elle savait bien que sa supérieure et amie avec des vues plus que concrètes – ou même en dehors de leur employeur de toujours, s'il le fallait. Et leur retraite elles la prendraient ensemble, dans leur magnifique villa ou ailleurs, tient !

Et puis même, au-delà de cette amitié sans limite et de se lien sans égal, il y en avait d'autres sur lesquels elle espérait pouvoir compter à coup relativement sûr. Linia-Chan, par exemple, la Capitaine de la Onzième Section, jadis membre de la Première Section en même temps qu'elle, qui avait été, et était encore, son amie, et plus que cela même, particulièrement dans des domaines réclamant deux participantes, une chambre et beaucoup d'affection mutuelle, mais qui était aussi une guerrière d'élite et un membre précieux de la Blitzness Corporation, sur qui elle pouvait se reposer et qui, elle l'espérait tout du moins, n'allait pas y passer de si tôt. Sans compter qu'à l'inverse certains avaient rejoint la Section d'Élite en venant de l'extérieur, comme par exemple Zwei, qui maintenant était second Lieutenant dans sa Section qui était également la sienne, et qui se montrait un élément de valeur, même au regard de ses propres critères et de ceux de ce groupe de choc. Et lui non plus n'allait pas y passer tout de suite non plus, il était trop dur au mal, et puis, elle le savait de source sûre, il avait également une beaucoup trop bonne raison de rester en vie pour se permettre de mourir, ce qui au fond était toujours rassurant.

Ce fut alors que, arrivée là de ses réflexions, elle arborait un sourire plutôt engageant, qu'elle vit soudain surgir devant elle... Une Goule ! Elle n'eut même pas à réfléchir, les réflexes prenant le pas sur tout le reste, et un pieux de glace fut fiché dans l’œil de la créature avant qu'elle n'ait pu faire le moindre geste pour se défendre. Simple, rapide, et terriblement efficace, aussi. C'était, auraient dit certaines mauvaises langues, dans le plus pur style de la Première Section : attaquer d'abord, poser des questions ensuite, éventuellement, s'il restait quoi que ce soit de vivant à l'horizon. Mais bon, dans le cas d'une Goule, de toutes les façons, il n'y avait pas beaucoup d'information à tirer, et la principale se déduisait plutôt de la simple présence de la créature. Elle signalait dans la plupart des cas qu'il y avait un rassemblant de Teremundos dans les parages, ou, pire, un monstre plus puissant qui s'amusait à créer des Goules et autres bestioles de faible rang pour s'amuser, ou alors pour se faire une petite armée, personnelle, aussi, tout étant possible. Bien sûr, elles pouvaient plus rarement être le fruit d'un accident isolé, mais il fallait être réaliste, quand on était envoyée pour enquêter sur des « miasmes » laissés par des Teremundos, cette éventualité était drastiquement peu probable...

Ce fut donc en toute logique que la belle Dame de Glace se mit à remonter la piste de la Goule, facilement repérable dans le Marécage car encore toute fraîche. Elle comptait bien ainsi remonter à la source du problème et le régler une bonne fois pour toute, si possible. Frapper au cœur du problème, trancher la tête du serpent... autant de maximes plus que classiques mais qu'elle enseignait tout de même à ses jeunes recrues lors de ses formations, et vu les réussites qui attendaient lesdites recrues ses conseils ne devaient pas être tellement pourris que cela. Outre feu le Capitaine Jill, mentionné un peu plus haut, on pouvait aussi compter au nombre de ses anciens élèves la Capitaine Gretchen, qui dirigeait la Section des Informations Stratégiques et par-là même les informations d'archives en tous genre, mais aussi la Lieutenante Elvanshalee qui, en dépit de son caractère plus original avait réussi, en grande partie grâce au temps passer dans la Première Section, à décrocher son grade dans la Section de Soin, ou encore le Lieutenant Jake, qui avait été officier dans la Section de Protection au temps où celle-ci était plus ou moins active, la faisant tournée malgré le Capitaine Rude qu'il devait se coltiner à l'époque.

Oui, tout cela lui faisait bien des souvenirs, mais en attendant c'était une nouvelle fois l'heure de prouver qu'elle ne savait pas seulement donner des leçons, elle savait aussi les appliquer ! Et pas seulement en duo avec ceux qui en avaient profité ou avec d'autres, comme Lucia-Sama ou même une fois Nécrolia-Sama, le Capitaine de la Section des Finances, aujourd'hui disparu, mais si besoin aussi en solitaire, comme elle l'avait d'ailleurs fait de nombreuses fois par le passé. Et cette nouvelle preuve, ce serait la découverte de ce qui n'allait pas ici, ainsi que la résolution brutale et définitive dudit problème, quel qu'il puisse être. Oh, bien sûr, personne ne lui demandait de prouver quoi que ce soit, personne ne lui demandait, même... sauf elle-même. Car oui, elle était ainsi faite qu'elle avait souvent besoin de se remettre en question, sans pouvoir s'en empêcher, elle avait toujours besoin de se prouver à elle-même qu'elle était à la hauteur. Cela avait été le cas, pas exemple, après sa défaite d'un cheveux face à Aokira Mind, le Tchetyre de l'époque – qui était maintenant le « nouveau » Dva, même si ça faisait déjà un bon petit moment, en fait – lors de la Bataille de Las Fantas. Et elle avait réglé le problème en s'entraînant toujours plus loin... mais aussi en battant et en capturant le nouveau Tchetyre, Drax Lerouge, qui était mort en prison depuis lors.

Et cette fois, c'était ce nouveau défis qui lui donnait le besoin même d'être réalisé, par elle, d'être relevé par elle, même, de trouver en elle et avec elle son accomplissement. Un défis qu'elle n'allait sûrement pas rejeté, foi d'Alwine Azamalon. Elle allait trouver cette bande de Goules, ou ce rassemblement de Teremundos divers, ou ce monstre s'amusant à s'entourer d'une légion de créatures inférieures, ou quoi que ce puisse être, et elle allait éliminer une bonne fois pour toutes les « miasmes » qui hantaient encore ces contrées, préparant peut-être, qui pouvait savoir, la voie pour un possible prochain rattachement de ce territoire aux domaines sans cesse grandissant de la Blitzness Corporation. Des domaines qu'elle avait participé et participait encore à agrandir, d'ailleurs, par des expéditions de reconquête bien encadrées et prévues, certes, comme par exemple celle de LéaFirma en compagnie de Lucia-Sama, mais aussi par des événements plus ponctuels et imprévus, comme les captures – celle de Drax et celle d'un assassin presque inconnu – qui, au terme de longs combats, lui avaient permis de rattacher aux domaines de la toute-puissante entreprise-état non seulement le Village Tribal – cela lui avait valu les félicitations du Patron-Directeur-Général, par écris – mais aussi par exemple son île natale, l'Île de la Pomme, qu'elle avait été très heureuse de ranger sous cette protection qui, elle l'espérait, lui assurerait la tranquillité sur le long terme.

Tant qu'à faire, elle allait aussi tranquilliser un peu cette région-ci, même si elle doutait que ce soit aussi durable. Enfin, qui ne tentait rien n'avait rien, et puis il fallait bien y aller par étape pour faire certaines choses, et d'autres pourraient achever le travail plus tard... si elle ne s'en chargeait pas elle-même, bien entendu, ce qui était toujours possible aussi ! Dans tous les cas, il était peu probable que les Teremundos les laissent faire, eux qui, par nature, étaient des créatures enclines à toujours plus de destruction, qui étendaient sans aucun scrupule les tentacules malsaines de leur influence néfaste – belle accumulation d'adjectifs négatifs, hein, mais vu les bestioles c'était loin d'être exagéré ! – sur des terres qu'ils ne demandaient qu'à dévaster, souiller, corrompre. Et même quand ils n'occupaient pas effectivement le terrain, ils laissaient, comme ils l'avaient fait ici, de sombres traces de leur présence qui peu à peu gangrenaient la nature elle-même, comme une tumeur maligne qui se serait peu à peu développée au cœur même des choses. Une excellente raison pour nettoyer tout cela, et de la manière la plus radicale qui soit, au besoin. Et comme elle était en plus payée pour cela, grassement par-dessus le marché, elle ne voyait pas pourquoi elle s'en serait plainte une seule petite seconde ! C'était un travail d'utilité publique généreusement rétribué, en somme, et vu qu'elle était extrêmement douée pour cela tout était donc pour le mieux.

En attendant, pour accomplir ledit travail il lui fallait d'abord trouver l'endroit où se terrait la menace, et donc continuer à remonter une piste de moins en moins fraîche. Heureusement pour elle, d'autres se chargèrent bien gentiment de rafraîchir ladite piste à sa place. Ces autres, c'étaient des Teremundos, tout simplement qui, confirmant qu'elle se rapprochait du but, virent l'attaquer avec plus ou moins de discrétion. Néanmoins, elle restait toujours sur ses gardes, et à chaque fois cela échoua lamentablement. C'étaient toujours des Goules, mais elles semblaient instinctivement adaptées aux Marais, comme si elles y avaient vécu dans leur vie d'humains. Sans doute était-ce là tout ce qui restait de populations indigènes qui avaient été contaminés par les Teremundos d'une façon ou d'une autre. Mais qu'ils s'en prennent à elle par seul, en duo ou même en petit groupe – ils avaient été jusqu'à cinq, une fois – cela ne suffisait jamais à la mettre en difficulté ni même à l'arrêter bien longtemps. Elle était l'un des meilleurs éléments de la Corporation, on l'a déjà dit, et ce n'étaient pas quelques Goules qui allaient l'arrêter ! Non seulement elle était bien plus forte qu'elles, mais encore elle avait une longue habitude de ce genre d'adversaires et savait donc comment en venir à bout facilement et rapidement, comme la plupart des Teremundos dits « classiques », ceux que l'on rencontraient le plus souvent – une liste où les Goules arrivaient bien sûr en tête.

Ce fut donc sans problèmes que, de rajustement de trajectoire en rajustement de trajectoire, elle arriva finalement en vue de son ultime destination. Cela se trouvait être, tout simplement, les ruines d'un ancien petit village qui, quelques temps plutôt encore, avait dû vivre sa petite vie tranquille au fond des marécages, là où aucun grand groupe humain n'avait d'intérêt à aller et où on devait donc laisser les habitants relativement en paix. Seulement voilà, les Teremundos n'avaient aucun besoin de raisons pour frapper là où ils frappaient, et ils n'avaient visiblement eut aucun scrupule à dévaster les lieux. Était-ce un Teremundo puissant qui, après avoir réduit tout autour de lui à l'état de ruine, s'en était retourné en aillant contaminé quelques petites choses ? Ou bien un groupe d'être plus faibles qui avaient attaquer le village pour se nourrir de ses habitants et augmenter leur nombre, une partie ou tout le groupe restant ensuite sur place et occupant les lieux ? Était-ce un avant-poste de quelque chose, ou bien simplement un lieu vide qui avait été occupé par une bande de créatures ? Il était impossible de le déterminer, et du reste cela n'avait pas grand intérêt, puisqu'il restait que le problème était bel et bien présent, et qu'il allait falloir le régler.

Ledit « problème » était incarné par une immense créature qui se trouvait au centre du village. Il tenait partiellement de l'oiseau et partiellement heu... d'elle ne savait pas trop quoi en fait, probablement du reptile. Ce devait probablement être une créature indigène aux Marais qui avait muté à un moment quelconque et avait ensuite réussi à se placer au sommet de la chaîne alimentaire locale. Elle n'avait pas l'air aussi dangereuse qu'un Atlas ou même un Golem, mais ce n'était pas pour autant que la belle Lieutenante allait la prendre à la légère, loin de là même ! Ne jamais sous-estimer un ennemi, c'était là une règle de base, et si elle n'avait pas été capable d'appliquer les règles de base elle n'aurait probablement plus été en vie aujourd'hui, et sûrement pas là où elle était. Elle jaugea donc son adversaire principal à distance, en se rapprochant peu à peu, tentant d'estimer quelle serait la meilleure approche. Il devait avoir une certaine intelligence, vu qu'autour de lui ne se trouvaient que des Goules dont certaines avaient à peine légèrement commencé à évoluer, ce qui indiquait bien qu'il exerçait un contrôle sur la chaîne élémentaire teremundis locale, empêchant ses rivaux potentiels d'émerger tout en maintenant une certaine masse autour de lui.

L'attaque frontale, au corps à corps, qui était sa tactique favorite, ne serait donc probablement pas la meilleure de stratégie à adopter dans ce cas précis. Oh, certes, cela pourrait sans doute fonctionner, et très bien même, particulièrement si elle usait de sa redoutable épée de Trimûrti, mais elle avait là une occasion de tester autre chose, une chose à laquelle elle réfléchissait depuis un bon petit moment déjà. Cette chose, c'était tout simplement une nouvelle technique, ou pour être plus précise l'évolution d'une ancienne technique à laquelle elle allait rajouter une nouvelle donnée, qui avait entre temps été portée à son achèvement. La théorie en était fort simple : elle allait pousser plus loin son Double Rayon, en y ajoutant tout simplement un Rayon de Glace, formant ainsi un Triple Rayon, encore plus destructeur que le précédent. Mais ça, ce n'était que la théorie, il fallait encore voir à la mettre en pratique ! Déjà, il faudrait plus de maîtrise pour ce coup, qui était plus complexe dans sa réalisation, mais sur ce plan-là elle pensait bien être en ordre, alors il n'y avait pas de soucis. Il faudrait aussi faire attention à l'énergie que cela demanderait, une énergie qui serait probablement plus que gourmande, et à tout un tas d'autres paramètres, autant de raisons pour lesquelles elle avait déjà longuement prit le temps de peaufiner tous les détails.

Et c'était donc là une occasion plus que rêver pour l'essayer. Une fois assez proche, elle créa une petite structure de glace pour pouvoir s'appuyer dessus puis visa posément, sans se presser. Alors que la créature s'exposait en criant et en battant des ailes, elle lança sa nouvelle attaque – un Triple Rayon, donc – droit sur son poitrail... et le toucha en plein dedans. Hé, c'était qu'elle avait appris à viser, depuis le temps qu'elle utilisait sa gamme de trois, puis quatre et maintenant cinq attaques à base de divers rayons. Elle n'avait pas prévu qu'il serait si puissant, cela dit, et fut quelque peu étonnée de voir l'énorme cratère qui s'était formé au centre du village une fois la poussière de l'explosion disparue. Visiblement les choses avaient été gelées et explosées en même temps ou à un très faible intervalle, ce qui donnait une combinaison pour le moins... redoutable. Cela devait aussi être l'avis des Goules qui, paniquées par la disparition de la puissante créature fuyaient en tous sens, sauf du côté où était venu l'attaque. Il faudrait toutefois rapidement faire disparaître les restes du monstre, qui gisait au fond du cratère avec ceux des Goules les plus proches, pour ne pas qu'elles ne reviennent s'en nourrir et ainsi profiter d'une manne énergétique inespérée.

Il faudrait aussi traquer les monstres mineurs et les éliminer, mais cela, ce n'était pas vraiment son soucis pour le moment. Son énergie avait baissée un rude coup, et elle préféra rentrer pour le moment. Usant d'une commande qu'elle avait toujours avec elle, elle appela son Falco, qui arriverait sans doute à la vitesse du vent jusqu'à elle. Elle utiliserait ses missiles pour annihiler les cadavres, puis retournerait avec lui à la base la plus proche – à savoir LéaFirma – pour faire rapport de sa mission et demander que des unités normales soient envoyer traquer la vermine, à moins qu'elle ne revienne elle-même le faire plus tard. En tous cas, elle avait remplis sa mission en identifiant le problème et en en éliminant la cause principale, et elle avait réussi à finaliser une nouvelle technique. C'était donc une très bonne journée, et elle considérait avoir largement mérité d'aller boire un verre et prendre au moins un peu de repos !